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Comment lutter contre la mortalité infantile
"Au Sénégal, la vulnérabilité des enfants constitue une réalité", soulignait l’Unicef dans son rapport sur la pauvreté dans le pays en 2009. Les moins de 5 ans, estimés à plus de 2 millions, représentent 15% de la population. Près de 63% vivent en milieu rural, là où les conditions de vie sont les plus précaires. La grande majorité (85%) habitent dans des ménages qui dépassent 7 personnes et dont le chef de famille ne possède aucune instruction (pour 74% d’entre eux).
La situation sanitaire les concernant reste préoccupante et difficile à analyser : 40% n’ont pas été enregistrés à la naissance et 23% sont orphelins. Le fonds des Nations Unies pour l’enfance révèle qu’un enfant sénégalais sur 5 n’a été vacciné contre aucune maladie et que 5% n’ont accès à aucun service de santé. Même si le taux de mortalité infantile (toujours pour les enfants de moins de 5 ans) a diminué de plus de moitié depuis 20 ans - il est passé de 142 cas pour 1000 naissances en 1990 à 60 en 2012 - celui-ci demeure élevé et touche les nourrissons de moins de 27 jours (mortalité néonatale) dans un cas sur 2. On estime qu’un enfant sur 8 meurt avant d’avoir atteint l’âge de 5 ans au Sénégal.
En vue d’améliorer la situation, l’État sénégalais s’est engagé dans un défi de taille : la mise en place de la couverture maladie universelle gratuite pour les enfants de 0 à 5 ans.
En vigueur dans le pays depuis le mois de janvier 2014, l’initiative doit assurer la prise en charge totale des soins concernant "les affections prioritaires les plus morbides et les plus meurtrières - parmi lesquelles le paludisme, les diarrhées, et la malnutrition", dixit le plan stratégique de développement de la CMU du gouvernement.
La décision fait suite à la 67ème session de l’Assemblée générale des Nations Unies en décembre 2012 appelant chaque État membre de l’ONU à modifier le financement de son système de santé. L’objectif : ne plus recourir au paiement direct des soins par la population mais par l’intermédiaire de mécanismes plus équitables et solidaires. Pour ce faire, le ministère de la Santé et de l’Action sociale sénégalais a bénéficié en 2013 d’une enveloppe de 5 milliards de francs CFA (7,6 millions d’euros) pour aider les mutualistes du pays, organismes devant prendre à leur charge la nouvelle politique de CMU. Avec cet argent, l’État subventionne 50% des cotisations des mutualistes - soit 3 500 francs CFA (5€) sur 7 000 francs CFA (10,50€) par adhérent et par an.
De nombreux acteurs du milieu médical remettent en cause la viabilité de la nouvelle politique sanitaire du pays voulue par le président Macky Sall et par sa ministre de la Santé Awa Marie Coll Seck. Le plan de développement de la CMU mentionne que la prise en charge des malades doit être totale dans les postes et centres de santé ainsi qu’aux urgences des hôpitaux. Cependant, les professionnels du secteur soulignent que le Sénégal manque toujours cruellement de structures adaptées et en nombre suffisant pour accueillir la population. Le manque de moyen octroyé aux dispensaires soulève une autre question : comment rémunérer le personnel médical en charge des soins gratuits, dont la demande risque de fortement augmenter, une fois la population bien informée ?